Cet article vous présente “Les choses” de Georges Perec
Vous connaissez certainement le dicton qui vous dit « saches d’où tu viens pour savoir où tu vas. » Evidemment, ça paraît facile, mais sans dire non plus que « l’histoire se répète » et tous nos blablas… un petit coup d’œil en arrière pour comprendre notre vie d’aujourd’hui, n’est pas inutile – puisque Louis Pauwels nous dit aussi « Chaque humain arrive au présent avec un passé composé. » (« Les dernières chaînes », 1997).
Trêve de citations. C’est un peu comme lorsque vous discutez avec vos grands-parents ou les « anciens » de votre famille. Si vous écoutez bien, vous y trouverez toujours des conseils bons à prendre et quelques expériences à remettre au goût du jour. Et parfois de véritables pépites ! D’autant plus qu’au final, sur les grands chemins de la vie, nous passons tous par les certaines étapes : jeunesse, jeune adulte, moment de se stabiliser, travail, couple, et nos grandes questions concernant la liberté de soi ou l’encrage dans un quotidien qui nous en demande beaucoup.
Alors je vous invite à vous asseoir confortablement avec Georges Perec pour passer quelques temps avec lui et écouter un peu ce qu’il à vous dire.
Car oui, de là où il est, il s’exprime toujours… C’est le pouvoir des livres…
Et ce pouvoir, vous l’avez au bout des doigts :
Alors pour tous ceux qui voudraient se simplifier la vie aujourd’hui et qui se posent la question de leur liberté, de leur bonheur : lisez ou relisez « Les choses » de Georges Perec.
Et posez-lui vos questions : il vous répondra…
C’est aussi la magie des livres.
Présentation de votre compagnon de route : Georges Perec
Georges Perec, né le 7 mars 1936 à Paris, Français, Juif d’origine polonaise, ses parents meurent tous deux lors de la seconde guerre mondiale – son père engagé volontaire contre l’Allemagne est blessé mortellement, sa mère perd la vie déportée à Auschwitz.
Il est auteur, verbicruciste (il conçoit des mots-croisés), membre de l’OuLiPo (Ouvroir de Littérature Potentielle), qui selon Raymond Queneau, dans l’Abrégé de Littérature Potentielle, regroupe littéraires et mathématiciens de par le monde qui se désignent comme des « rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir ». En 1969, Georges Perec fait notamment disparaître la lettre « e » dans l’entièreté d’un roman de 300 pages et la fait réapparaître – et elle uniquement, en 1972, avec « Les Revenentes. » Voyez qu’il y a moyen de s’amuser avec lui !
Vous trouverez une rue dédiée à son nom dans le 20 arrondissement de Paris, elle est entièrement piétonnière et un escalier la coupe en son milieu…. C’est dit : si vous cherchiez un endroit oulipien où le lire tranquillement.
Minimalistes : regardez d’où nous venons avec « Les choses »
Je vous parle du livre « Les choses » (prix Renaudot en 1965), qui n’est pas roman, c’est son auteur qui le dit ! Curieux à lire, il nous fait réfléchir en nous faisant revivre la société de consommation des années 60 et le rêve tout conditionnel qu’il est de posséder des « choses » pour être heureux.
Au sortir de la guerre, les trente glorieuses en plein, ce récit nous montre aujourd’hui d’où nous venons, et comment nos parents (pour les 40-50tenaires d’aujourd’hui) – ces jeunes des années 60, ont formé le terrain de nos consommations actuelles. N’aurions-nous pas nous-même agit de façon identique dans leur contexte ? Et n’agissons-nous pas aujourd’hui avec des désirs communs selon le nôtre ?
Le soulagement d’après-guerre, la consommation montante, et le rêve de tout un chacun de posséder enfin autant qu’il le souhaite, autant que celui qui se trouve « au-dessus de lui ». Tout cela, nous y répondons aujourd’hui dans un contexte où tout va de plus en plus vite : la consommation de biens, d’information, de savoirs, de relations sociales et réseaux ; la concurrence à l’échelle mondiale. Nous en sommes arrivés à ce stade où nous demandons un peu de répit, un peu de tri et d’ordre. La surconsommation ne nous nourrit plus, elle nous écrase. Alors on parle de simplicité volontaire, de minimalisme, de zen, de vide, de less is more, de slow, la frugalité, de vie humble, de dépouillement, de retour aux sources, de consommation responsable, d’alimentation durable, etc.
Et finalement, nous tournons toujours tous autour de cette même question : comment gérer les choses pour faire notre bonheur ?
Alors relisez « Les choses » de Perec – toujours d’actualité, il vous apprendra des choses sur vous, sur ceux qui nous précèdent, et du coup sur les petits ceux et petites celles qui un jour se poseront cette même question des choses et de leur bonheur potentiel.
Quelques mots sur « Les choses »
Pas un roman, mais tout de même une histoire, celle d’un couple, de choses, d’amis, et encore de choses. Sylvie et Jérôme ne s’expriment jamais par dialogues dans le récit, ils n’ont pas d’existence propre selon l’auteur, ils sont l’exemple, les représentants de toute une génération – celle des jeunes adultes de sixties. Allégorie littéraire de phénomènes sociologiques d’un style simple, qui va droit au but et aux choses de la vie quotidienne.
Récit bref, 158 pages dans la version Pocket. Témoignage lucide d’une époque, sans prétention de condamner la société de consommation, ni de proposer une « décroissance », mais qui dessine simplement le piège de la consommation sans fin. Vous vivrez au travers du couple de Sylvie et Jérôme les oscillations entre le bonheur de rêver les choses et le désœuvrement de ne pas toujours y avoir accès.
Toujours d’actualité non ? Voyez comment nous y répondons aujourd’hui.
Avec « Les choses », Georges Perec répond à des questions fondamentales de votre vie
– Echanger votre liberté contre votre travail
Le récit « Les choses » vous parlera entre autres de l’échange de notre liberté contre le travail pour pouvoir nous payer ces choses qui semble faire inéluctablement partie de la vie, mais qui sont en fait une injonction sociale. Les autres, les patrons, les voisins, los proches, tout le monde, attendent de nous que nous nous « stabilisions », et y voient une représentation de la réussite. Une belle voiture signifierait « il a bien réussi dans la vie », une grande maison « elle a bien réussi dans la vie ».
Or, c’est cette course pour répondre à cette injonction qui serait à l’origine de notre perte. « Les choses » de Georges Perec nous rappelle de ne pas confondre l’effort et le but dans notre vie.
En cela, le Zen, le Tao, et autres « arts de ne rien faire » et du vide plein de sens, y répondent « très bien ». Ces nouvelles tendances y portent des solutions novatrices : « arrêtez de courir après vos désirs, ne cherchez pas à plaire aux autres, recentrez-vous sur vos projets essentiels ». Elles proposent les portes de sortie d’une surconsommation effrénée – tout en restant dans la consommation – une autre consommation, parce que nous sommes obligés de consommer : de manger, de nous loger, nous éduquer, etc.
D’où un certain succès actuel en occident.
– La simplicité : notre révolution domestique underground
Avec les mouvements de « simplicité », nous tenons-là un regard qui nous légitime pour « sortir de la course ». Tout en créant une société non plus basée sur des valeurs de consommation et de celui qui vend le mieux – le plus – le plus cher – le plus vite, mais celui qui réalise un produit qui a une réelle valeur ajoutée pour ceux qui en profitent et dans une optique « éthique » de l’évolution de notre société.
Pour nous le livre de Perec ne trouve plus son écho dans la rébellion de Mai 68, où le temps de la sagesse et de la prudence sont remis en cause ; mais il trouve son écho dans le Zen, le rangement, le minimalisme, l’épuré, qui est plutôt une autre forme de sagesse et de prudence à laquelle nous devons tout autant rester vigilent et critique.
La révolte actuelle des choses se fait joue plus dans les rues, comme celle de mai 68, mais dans nos maisons et aussi dans les magasins, marchés, ventes de seconde main, internet.
Ainsi vos actes – tous vos actes, même s’ils paraissent solitaires, sont des actes forts qui participent d’un même mouvement et d’une rébellion constructive : celui de mieux consommer.
Ce sont vos actions pour sortir du déterminisme des choses, et prendre votre liberté en main.
Peu importe ce que nous entreprenons, restons à l’écoute de nous-même, de notre génération, de l’histoire, car chacun construit le monde pour les suivant en répondant à la génération précédente. Donc essayons de rester conscient de ce que nous faisons car nous créons « notre temps ». Tout particulièrement ceux que l’on dit être dans « la force de l’âge », la « force de travail », vous avez la force de créer notre monde.
– Regardez votre désir de posséder en face
Ainsi le malheur ne se trouverait pas tant dans la chose elle-même mais dans notre fantasme de la posséder. Devenir riche, nos désirs, nos souhaits sont le véritable piège. La tentation nous écrase avant que ne nous écrase l’objet, qui souvent d’ailleurs, une fois possédé, est délaissé quelques instants plus tard pour une autre course, une autre quête. Sans fin. Ce sont bien nos désirs qui nous font courir et nous épuisent.
Et finalement l’amas de choses entassées nous écrase elle aussi, ainsi que l’argent, son manque, son besoin de le gagner, de le trouver, d’en faire quelque chose lorsqu’on en a trop, de faire quelque chose lorsqu’on n’en n’a pas assez … et les disputes, le mal-être, les mesquineries que l’envie, l’appât du gain fait naître chez les humains.
Petite mise en situation – face à vos désirs :
Imaginez un instant : qu’en est-il de nos maisons, toujours plus grandes, toujours plus belles, toujours en projets, repeintes, refaites, rénovées, mieux adaptées… Dans votre cas, que se passerait-il si vous décidiez simplement de ne rien faire ? Rien. Comment serait votre vie ? Laissez-vous imprégner de cette image quelques instant.
Vous pouvez faire pareil avec la nourriture, les vêtements, les sorties, vacances etc.
Ensuite lisez ceci : Cela vous semble-t-il possible ? …Maintenant, vous avez senti la puissance de vos désirs.
Le but n’est pas d’annuler les désirs, mais bien de ne pas les laisser nous dévorer. De trouver la position la plus confortable entre l’assouvissement de nos désirs et leur prix réel pour notre liberté et notre bonheur.
– Un détour par les mondes vides et purifiants
Avec Sfax et un détour vers un autre monde, isolé, dénué de choses et de sens, détoxifiant; les voyageurs, expatriés, pèlerins, randonneurs, marcheurs, et autres porteurs de sac-à-dos, reconnaîtrons le passage purifiant du dépouillement. Mais aussi le vide de la perte de sens, l’étrange étranger. Puis, le retour… Dans un déterminisme quotidien rempli de choses que nous ne pouvons éviter, nous dit Georges Perec. Et pourtant, actuellement, nous œuvrons dans l’ombre de nos maisons, des commerces, des réseaux sociaux, pour une troisième voie : celle d’un rangement essentiel à l’intérieur de notre société de consommation, pour le meilleur de notre temps et de nous -même.
C’est là que réside notre liberté : dans nos actions choisies. En « pleine conscience », pour reprendre les mots d’aujourd’hui.
Ce sera aussi le chemin d’Estelle (découvrez l’extrait “Et dire que je voulais la même coupe”).
Alors : Comment réécririez-vous « Les choses » de Georges Perec ?
C’est, entre autres, ce que propose Estelle l’Oiseau en portant nos voix, sur son chemin à elle. Un chemin – celui de Compostelle, qui symbolise nos réflexions, nos changements, nos tris, nos essentiels, nos choix, nos malheurs et nos joies ; ce toujours au milieu de ces fameuses choses. L’enjeu : nos relations sociales et dans ce cas, familiales.
Que se passera-t-il pour Jérôme et Sylvie, une fois casés, une fois installés… Dans leur boulot, dans leur belle maison, avec leurs choses ? Ils auront des enfants, qui amèneront plus de choses encore…
« Les choses » s’arrête lorsque Jérôme et Sylvie s’installent mais ne parle pas de la constitution d’une famille. Estelle raconte l’après, quand le couple est établis dans deux boulots, installé dans une maison, avec de belles choses pour la meubler et pour se chouchouter, et ensuite… Les enfants, le boulot qui s’effrite pour Estelle, mais la famille s’agrandit et avec eux, encore plus de choses et de rêves, et de besoins, et comme le disent certaines mères dans « Le conflit. La femme et la mère » d’Elizabeth Badinter (je vous en parlerai dans un autre article), Estelle se dira « on ne m’avait pas prévenue ». Estelle donne chaire, donne vie à cette famille attablée devant ce « repas franchement insipide ».
Elle aura la chance de connaître le malheur.
De toucher le fond, de le crever, de passer de l’autre côté, et d’entrevoir une autre manière de vivre qui représente cette fois notre génération. Ces parents actuels qui se demandent comment se simplifier la tâche, ou comment sortir du cercle vicieux des choses.
Notre désir commun d’être plus libre, plus heureux mais cette fois pas en possédant plus, mais en possédant mieux, moins, autrement.
C’est le chemin d’Estelle que nous suivons, ce sont nos chemins qui nourrissent le sien.
Pour en savoir plus sur l’écriture du roman La Maison Compostelle d’Estelle l’Oiseau , cliquez ici.
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Crédit Photo: FlickR
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